Le Chanteclerc
Le lot 7A, d’une largeur de deux arpents, sur toute la longueur du lac Rond fait font l’objet de diverses promesses d’achats, ventes, échanges jusqu’au 21 août 1895 où Dominique Longpré cède la terre à son fils Martial.
Ce qu’en 1899, que les autorités évoquent la possibilité de faire un chemin autour du lac Rond, dont la partie nord. Martial Longpré divise ses terrains en cinquante lots et les met en vente. On peut alors se procurer pour la somme de 50 dollars, un lopin de terre de 60 pieds par 90 pieds, situé à une distance de 18 pieds du lac Rond.
Herbert A. Matley achète le lot 7A, le 8 mars 1913, dans le but d’y construire un hôtel et demande au conseil municipal de lui accorder une licence pour vente de boisson. Les cultivateurs voient de bon œil la construction d’un tel bâtiment qui pourrait développer la villégiature et créer un nouveau marché pour leurs produits. Le conseil accorde la licence pour une durée d’un an et Matley s’engage en retour à acheter 300 lampes électriques. La perspective d’avoir de la lumière, de meilleures routes et un chemin autour du lac s’est avéré crucial pour l’octroi de cette licence.
Le 14 mai 1913, l’avocat Descaries, représentant le syndicat Matley, recrute des ouvriers, journaliers, charretiers, etc., qui souhaitent travailler à la construction de l’hôtel des touristes. La ville accepte de ne pas évaluer l’hôtel et ses dépendances à plus de 20,000 dollars pendant dix ans. Cela assure néanmoins au conseil une taxe d’au moins 50 dollars et aux commissaires d’écoles un revenu annuel de 140 dollars.
L’hôtel aurait ouvert ses portes en 1915 alors qu’Herbert Matley le revend à James Kerr. Monsieur Herbert Henry Field qui fait partie de la Reliance Investment avec John Henry Thompson l’achète. Thompson, acquiert en 1924 et 1925 le propriétaire de la National Bakeries Limited, Roland Edward Kingsley achète l’hôtel.
Au début des années 1930, John Munro Thompson décède et l’hôtel et le site environnant reviennent à sa femme Mary Muriel Brodie Thompson qui le lègue le tout quelques années plus tard à son fils Arthur Brodie Thompson.
Les différentes phases du Chantecler
Sur le site de l’ancien hôtel Matley, un syndicat formé d’hommes d’affaires de Montréal fait construire un élégant immeuble à la forme irrégulière qui comprend une première section de deux étages, avec ses murs de pierres des champs surmontés d’un toit mansard. Des lucarnes sont présentes à l’étage. Spacieux et moderne, le bâtiment construit d’après les plans de l’architecte Alfred Leslie Perry est inauguré le 10 décembre 1938. Tout l’ameublement, les tentures, les tapis et les draperies sont l’œuvre d’artisans de la région, dont Jean Palardy et sa femme Marjorie. L’hôtel possède 25 chambres et deux dortoirs
Charles L. Weldon qui a dirigé plusieurs hôtels à Montréal, Toronto, Détroit et ceux du Canadien National, assume la gérance du nouvel hôtel de ski, Le Chantecler à Sainte-Adèle-en-Haut.
En 1940, Arthur Brodie Thompson, président d’un groupe d’hommes d’affaires, fait l’acquisition d’un site de 400 acres. Dès l’année suivante, l’hôtel dédié aux skieurs offre de nouveaux tracés sur la montagne et les collines sont éclairées par la lumière artificielle, en soirée.
L’entreprise Chantecler Hills Estate, qui souhaite exercer le commerce général d’une compagnie d’immeubles est créée en 1944. A.-B. Thompson, tout en continuant de gérer le Chantecler, leur cède son titre de propriété.
On 1947, une aile supplémentaire est ajoutée à l’hôtel Chantecler qui compte alors 58 chambres. La gérance est assurée par Émile Marin qui est promu en 1953, au poste de gérant-général de l’hôtel et de sa filiale le Chantecler Hills Estate, domaine résidentiel. La capacité de logement dans l’hôtel passe à 150 chambres sans compter les chalets aménagés sur le domaine
Avec la construction d’un nouvel anneau de curling en 1953, la direction retient les services Vincent Massive, qui quitte son poste au Sea View de Miami Beach pour occuper la position de Directeur des sports et des relations publiques. Massive est associé au Chantecler jusqu’en 1962 où il s’occupe d’administration avant de devenir gérant général puis vice-président et membre du Conseil d’administration.
L’ancien curling est remplacé six ans plus tard et relogé dans un grand bâtiment sur une colline à l’arrière de l’hôtel. L’espace peut être utilisé sans glace pour les congrès et les bals.
Connu dans le monde de l’hôtellerie au Canada et aux Etats-Unis, George W. Powell est nommé président de l’hôtel Chantecler de Sainte-Adèle en 1958. La corporation prend le nom The Chantecler Hôtel Co. La première maison appartement du Chantecler, l’édifice Bellevue, est inaugurée en janvier 1965.
L’hôtel passe aux mains de la Warnock Hersey International Limited et René Murray est nommé au poste de directeur général de l’hôtel Le Chantecler en 1974. Ce montréalais possède plus de 35 ans d’expérience dans l’hôtellerie de villégiature et commerciale, a travaillé dans l’organisation des entreprises Holiday Inn et il a orchestré le lancement du Civic Square de Toronto.
L’hôtel Chantecler cesse ses opérations le 8 avril 1984. Le groupe d’hommes d’affaires, dirigé par Jacques Giasson, s’en porte acquéreur. Le centre de villégiature ouvre de nouveaux ses portes en décembre 1984. L’hôtel Chantecler est rénové et cent nouvelles chambres de luxe sont ajourées. On reconstruit le grand bâtiment qui fut longtemps le club de curling détruit par un incendie.
Le complexe hôtelier Chantecler se divise en trois secteurs différents : au centre, sur le site même du lieu dont Arthur Brody Thompson, se trouve maintenant l’hôtel, avec son lobby, ses salons, sa salle à manger, ses boutiques et une trentaine de chambres. Vers la gauche, c’est la Seigneurie, le rendez-vous des skieurs, avec une quinzaine de salles de réunions qui portent des noms équivoques de grands centres sportifs : Chamonix, Courchevel, St-Anton, Tignes, … On y retrouve un restaurant et d’autres chambres. Vers la droite, c’est le Châteauneuf avec ses 75 appartements, vendue en condominiums avec leurs petits balcons et terrasses.
La chaîne hôtelière des Gouverneurs sauve le Chantecler de la faillite en 1998. Des rénovations s’étirent durant la saison estivale de 2006 et l’hôtel est fermé. Une centaine d’employés sont mis à pied.
Les travaux de démolition partielle et de rénovation de la bâtisse, s’amorce en 2019. Bien que la ville ait souhaité que l’endroit construit en 1938 soit reconnu comme bâtiment patrimonial, les transformations des dernières années et les rénovations requises ne permettaient pas cette classification. Le Chantecler fera place à une résidence pour personnes retraitées multiservice, un projet estimé à 30 millions de dollars. L’entrepreneur prévoit démolir environ le tiers de l’hôtel, - la section administrative et le coin-terrasse – et rénover la partie préservée, notamment en apposant un nouveau revêtement. Le propriétaire Jacques Goupil dépose en 2019 un projet immobilier d’envergure, dont les premiers travaux sont amorcés en 2020.
Texte réalisé dans le cadre de l’Inventaire du ski dans les Pays-d’en-Haut, par le Musée du ski des Laurentides.

Hôtel Chantelcer, 1952 Conrad Poirier.